Zurich : victime d'un «deepfake» porno, elle porte plainte

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ZurichSes photos Instagram finissent dans un «deepfake» porno

Des images volées sur Instagram et manipulées par une IA ont été publiées sur un site porno étranger. Malgré une plainte, la victime peine à les faire disparaître.

L'usurpateur d'identité d'Anja s'enrichit illégalement grâce à son image.

L'usurpateur d'identité d'Anja s'enrichit illégalement grâce à son image.

Pexels

Anja*, une Zurichoise âgée de 39 ans, n'a jamais tourné dans un film pornographique. Pourtant, récemment, un de ses proches lui a signalé qu'il l'avait vue dénudée sur un site pour adultes. «Quelqu’un a volé mes photos Instagram et les a modifiées avec de l’intelligence artificielle, déplore-t-elle. Sur certaines images, c’est mon vrai corps, sur d’autres, un «deepfake», mais dans tous les cas, c’est mon visage!» Impuissante, elle se bat pour faire disparaître ces contenus, car ils sont trouvables sur Google avec un simple clic: «Et si mes fils tombent dessus? Ou mes voisins, d’autres connaissances – presque tout le monde peut les voir!»

Elle devra probablement «vivre avec»

Malgré une plainte déposée auprès de la police, celle qui a 3300 abonnés sur Instagram perd peu à peu espoir. Les autorités lui ont rapidement fait comprendre qu'elle devra «vivre avec», car leur marge de manœuvre dans ce genre de cas est relativement limitée: «La police m’a dit qu’ils ne pouvaient rien faire, car le site est basé à l’étranger et l’auteur est anonyme.» Une impuissance confirmée par Berina Repesa, porte-parole de Fedpol: «Ces contenus peuvent constituer une atteinte à la personnalité, mais leur suppression est compliquée lorsque les plateformes refusent de coopérer.»

Aujourd’hui, Anja surveille le compte qui a diffusé ses photos sur le site pornographique, mais elle n’a aucun moyen de le faire disparaître: «Ce type a même un statut Gold sur la plateforme.» Fedpol précise que les autorités suisses ne peuvent agir que contre des sites basés en Suisse diffusant des contenus illégaux. Dans ce cas précis, le site qui héberge les photos d’Anja est enregistré à Trinité-et-Tobago, hors de portée des autorités helvétiques.

*Prénom d'emprunt

Le phénomène ne fait que débuter

Créer et visionner des «deepfakes» pornographiques n'a jamais été aussi simple, même en Suisse. Selon Dirk Baier, directeur de l'Institut pour la délinquance et la prévention de la criminalité d'une haute école à Zurich, «leur utilisation continuera de se répandre». Si les plaintes restent rares pour le moment, plusieurs cas ont déjà été signalés dans les cantons de Zurich, Genève et Fribourg. Le professionnel déplore une absence de législation: «Le code pénal présente encore des lacunes, comme c'est le cas pour tous les nouveaux délits commis par voie numérique, dont la cyberintimidation.»

(fcc)

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