GenèveGenève rebaptise 100 rues en l'honneur des femmes
Le collectif féministe l'Escouade veut rendre leur juste place aux femmes qui ont marqué l'histoire.
Yvonne Bovard était violoniste. Marcelle Bard, théologienne et pasteure. Quant à Hélène Gautier-Pictet, elle a fondé une association pour le droit des femmes. Avec tant d'autres, elles font partie des «oubliées» de l'histoire collective. Leurs combats, leurs savoirs ou leurs arts ont contribué à forger la Genève que nous connaissons, mais leurs noms ne se sont pas hissés sur ses murs. Le collectif féministe l'Escouade a décidé de pallier le patriarcat urbain.
Loin de la parité
«Actuellement, on compte 41 rues avec des noms de femmes et 548 avec des noms d'hommes dans le Canton de Genève, déplore Myriam Gacem, membre de l'Escouade. Pour choisir une personnalité, deux critères sont pris en compte: la personne doit avoir marqué de manière pérenne l'histoire de Genève et être décédée depuis au moins 10 ans. Il n'y a aucun critère de genre. Pourtant, on est loin de la parité.» Fort de ce constat, le collectif féministe a lancé le projet 100Elles*, qui repense la place des femmes dans l'espace public et leur rôle dans l'Histoire.
Démarche officielle
Avec une dizaine d'historiennes de l'Université de Genève (Unige), L'Escouade a sélectionné cent personnalités féminines remplissant les critères officiels pour obtenir sa rue éponyme. Fait inédit en Suisse: la Ville de Genève soutient la démarche et a financé la fabrication de vraies plaques, par le fabricant officiel de ces panneaux, pour un coût de 35'000 francs. Vernies jeudi soir, elles resteront en place jusqu'en juin 2020. Aucun risque d'égarer la Poste ou les touristes: elles sont violettes, de la couleur des luttes féministes, et posées en-dessous des écriteaux bleus.
Bio en ligne
Toutes les biographies des femmes choisies sont publiées sur le site du projet. Les historiennes de l'Unige les ont écrites, aidées par des étudiants motivés. Dans la rue, les passants découvriront dix nouvelles plaques tous les quinze jours. Une thématique différente rassemblera les femmes par quartier: les militantes ornent déjà les Grottes, puis viendront notamment les artistes et les figures de la Genève internationale.
Collectif féministe
L'Escouade est un collectif féministe basé à Genève, créé en 2017. Il avait fait parlé de lui en avril dernier, après un dessin de clitoris à la craie dans le Jardin Anglais. L'amende initialement infligée par la police municipale avait été retirée quatre mois plus tard. Avec le projet 100Elles*, l'Escouade insiste sur les dangers de la sous-représentation des femmes dans l'espace public, qui amène notamment de l'insécurité.
Tentative valaisanne
Vendredi 8 mars, en marge des manifestations pour les droits des femmes, des féministes valaisannes ont aussi voulu rebaptiser les rues de Sion. En effet, aucune ne porte le nom d'une femme. La politicienne Viola Amherd ou l'ex-skieuse Chantal Bournissen ont brièvement eu leurs voies éponymes, avant que la police n'arrache les affichettes. Le collectif n'avait pas pu obtenir les autorisations nécessaires et leur action a été assimilée à de l'affichage sauvage.