Elue, elle ne siégera pas. C'est l'incompréhension

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GenèveElue, elle ne siégera pas. C'est l'incompréhension

La Genevoise Jocelyne Haller a tourné le dos au Conseil national à peine élue. Son geste et ses explications ont provoqué un tollé.

Maria Pineiro
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Maria Pineiro
Jocelyne Haller a renoncé à son siège au Conseil national.

Jocelyne Haller a renoncé à son siège au Conseil national.

Keystone/Martial Trezzini

«Inadmissible», «Lamentable», «Trahison», «Ça s'appelle fausser une élection». Lundi soir, Jocelyne Haller, toute fraîchement élue au Conseil national, annonçait à son parti Solidarités qu'elle ne siégerait pas à Berne. La députée genevoise a dit préférer se consacrer à son mandat au Grand Conseil, constitutionnellement incompatible avec une charge au niveau national. «Je porte de nombreux dossiers qui me tiennent à coeur et j'ai nombre de projets, a-t-elle souligné. Je pense pouvoir être plus utile à nos valeurs au Parlement genevois qu'à Berne.»

Le premier viennent-ensuite, Jean Burgermeister, également candidat au Conseil des Etats, a aussi renoncé à la chambre basse afin de maintenir le choix des votants d'élire une femme. C'est donc Stéfanie Prezioso Batou, tête de liste de Solidarités, qui représentera le parti à Berne. La nouvelle relayée par la presse a provoqué un tollé quasi unanime. C'est l'incompréhension qui domine dans les commentaires souvent scandalisés des lecteurs et de certains politiques concurrents.

Pas l'intention de tromper les électeurs

Mardi matin, la principale intéressée a estimé que cette décision ne constituait «pas une trahison des électeurs», tout en s'avouant «gênée et mal à l'aise» par la situation. «Cela ne va pas de soi, il va falloir expliquer ce choix aux électeurs de notre mouvement. Il n'a pas été fait à la légère», a précisé Jocelyne Haller. L'élue a dit «comprendre la déception des gens qui ont voté pour moi», mais a assuré «ne jamais avoir eu l'intention de tromper les électeurs».

La sexagénaire a expliqué que sa candidature au Conseil national visait «à tirer le groupe» de par sa notoriété. «Je ne voulais pas et ne pensais pas être élue. Je n'étais pas tête de liste, je ne me suis pas mise en avant à titre personnel durant la campagne. Ma candidature a été le fruit d'une décision collective, de même que celle de mettre en avant la relève de notre mouvement. Nos calculs se sont révélés erronés», a détaillé Jocelyne Haller. Elle a toutefois admis que «cette stratégie est peu lisible pour les non-initiés».

«Si le mandat au Conseil national avait été compatible avec celui de députée, j'aurais rempli les deux, du moins, un certain temps. Tout bien pesé, si c'était à refaire, je ne me serais pas présentée aux élections fédérales», a conclu Jocelyne Haller.

Des cas similaires mais pas identiques

A Berne, la conseillère d'Etat PBD, Béatrice Simon s'est retirée de la course au Conseil des Etats. Elle a par ailleurs renoncé à son siège au National. Dans le canton de Vaud, le PLR Olivier Français a annoncé à La Télé qu'en cas de non-élection à la chambre haute, il ne siégerait pas au Conseil national. Enfin, l'écologiste Daniel Brélaz avait annoncé il y a quelques mois déjà qu'il ne siégerait que deux ans à Berne avant de céder sa place à la relève. "Ces cas sont similaire, mais pas identiques, note le politologue genevois Pascal Sciarini. Dans les cas vaudois, la couleur est annoncée à l'avance. Pour ce qui est de Berne, on ne peut pas comparer un poste de députée à celui de conseillère d'Etat." En 2017, après les élections vaudoises, la Vert libérale Isabelle Chevalley s'était effacée devant moins connue qu'elle. Dans un autre district, c'est au sein de l'UDC qu'avait eu lieu le même arrangement. Last but not least, en 2008, après l'élection de l'Assemblée constituante, Pierre Vanek, de Solidarités, avait cédé sa place à Jocelyne Haller afin d'assurer une présence féminine au sein du groupe.

Peu respectueux

Le politologue genevois Pascal Sciarini se montre assez sévère quant au choix de Jocelyne Haller et de Solidarités qu'il juge "assez maladroit et peu respectueux de l'électeur". Selon lui, jouer le rôle de locomotive électorale puis renoncer à siéger dénote "une attitude légère". Le fait que les citoyens réagissent fortement et fassent part de leur déception ou soient fâchés est légitime. De plus, souligne Pascal Sciarini, "cette manière de faire est de nature à péjorer l'image de la classe politique".

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