Production de miel«Il s'agit de la pire récolte de l'histoire»
De nombreux apiculteurs européens, notamment les Français et les Italiens évoquent la pire récolte de leur histoire, à cause des aléas climatiques.

Les abeilles souffrent de plus en plus du dérèglement climatique.
AFP/Sebastian Gollnow2019 restera dans les annales comme étant la plus mauvaise en matière de récolte de miel. En Italie, le principal syndicat agricole, la Coldiretti, fait état d'une «année noire», avec «une récole quasiment divisée par deux» par rapport aux 23'300 tonnes collectées en 2018. En France, l'Union nationale de l'apiculture française (Unaf) donnent des chiffres quatre fois moins importants que dans les années 1990: «moins de 9'000 tonnes de miel seront produites cette année.»
Après 30'000 tonnes de miel récoltées en 2018, record ayant fait de la Roumanie la «championne» européenne, la production devrait être «inférieure à la moyenne (de 25.000 tonnes) de ces dernières années», a déclaré Constantin Dobrescu, vice-président de l'association Romapis.
Et en Espagne, premier pays devant la Roumanie en nombre de ruches, la récolte est en berne depuis 2015, avec une baisse de 5,2% en 2017 et une campagne 2018 «pas à la hauteur des espérances», selon le ministère de l'Agriculture.
Le climat «extrême» responsable
La Coldiretti explique cette chute par «l'évolution anormale du climat»: de janvier à début septembre, elle a recensé plus d'un millier d'événements météorologiques extrêmes en Italie (56% par rapport à 2018), entre grêles, tempêtes, trombes d'eau, vent et vagues de chaleur.
L'Unaf évoque elle aussi une «catastrophe climatique». Alors que les colonies étaient très peuplées au printemps, le froid soudain les a affaiblies, puis est arrivée la canicule fin juin. Dans certaines zones du sud de l'Hexagone, la chaleur a fait fondre la cire dans les ruches, piégeant les abeilles.
En Roumanie, «l'absence de précipitations durant l'automne et l'hiver derniers a durement touché les cultures de colza», entraînant une «production de miel très faible», selon un apiculteur local.
Les apiculteurs s'endettent de plus en plus
La chute de la production en Italie devrait entraîner une baisse des revenus de 73 millions d'euros cette année, auxquels s'ajoutent les dépenses liées à la nutrition des abeilles, que de nombreux apiculteurs ont été contraints de mener, les colonies mourant de faim.
De plus, les apiculteurs les plus mal lotis ne couvriront pas leurs coûts ou tout juste, et la situation sera particulièrement compliquée pour les jeunes exploitants endettés.
Si tous espèrent une amélioration des conditions climatiques l'an prochain, le président de l'Unaf, Gilles Lanio, craint «un contre-coup». Pour sauvegarder les ruches, «les abeilles ont déclenché des mouvements réflexes et tué tous les mâles pour éliminer des bouches à nourrir inutiles»: à cause du manque de mâles pour s'accoupler, il risque d'y avoir «un déficit de reines fécondées» au printemps prochain.
De surcroît, on assiste ces dernières années à une surmortalité des abeilles liée une «épidémie» de l'acarien parasite varroa, un développement «hors contrôle» du frelon asiatique en Europe et «l'utilisation intense de pesticides dans l'agriculture.»
Le miel chinois pointé du doigt
Alors que leur production chute, les apiculteurs tirent aussi la sonnette d'alarme vis-à-vis des importations massives de miel chinois, accusé d'être «adultéré», coupé par exemple avec du sirop.
Aucune législation européenne n'oblige les producteurs à préciser la provenance du miel. S'affiche ainsi sur les étiquettes «mélange de miels originaires et non originaires de la Communauté européenne», alors même que le produit peut contenir 99% de miel chinois et seulement 1% de miel français.