Coronavirus-SuisseDirectives de triage claires plébiscitées pour l'hôpital
Un laboratoire d'éthique a sondé plus de mille personnes afin de connaître leurs positions sur les critères utilisés par le corps médical.

Les directives de triage doivent être claires ont répondu la majorité des sondés à un questionnaire d'éthique.
Keystone/Martial TrezziniEn cas de surcharge du système de santé, il faut des règles claires pour savoir qui doit bénéficier d'une prise en charge aux soins intensifs et qui doit en être écarté. Les discriminations sont à proscrire. Mais s'il fallait choisir un critère, l'âge aurait son importance. L'argent ne doit pas constituer un passe-droit afin de bénéficier d'un respirateur. Ces affirmations constituent une partie des résultats d'un sondage mené par le laboratoire d'éthique Ethix auquel ont répondu quelque 1100 personnes, essentiellement en Suisse.
«Par le biais de ce questionnaire, nous voulons sensibiliser la population à ces problématiques éthiques», explique Johan Rochel, cofondateur d'Ethix. Le laboratoire a diffusé ce sondage dans son réseau, mais avec 1100 réponses, il estime que le résultat est représentatif, quand bien même l'échantillonnage n'est pas qualibré. «Dans une situation comme celle à laquelle nous sommes confrontés actuellement, il est nécessaire que nous menions un vrai débat de société, souligne Johan Rochel.»
Patients jeunes favorisés
Le questionnaire a permis de mettre en lumière des lignes de force théoriques et des choix pratiques. Ainsi, plus de 850 sondés se prononcent pour un système non-discriminatoire. Par contre, placé face au choix entre un patient âgé et un malade plus jeune , ce dernier est très clairement favorisé: quasiment 700 contre moins de 50. La raison principale tient dans le fait que les sondés estiment que la personne jeune a une espérance de vie plus longue. Sur le même modèle de réflexion, s'il faut choisir entre deux personnes du même âge dont l'une a un problème cardiaque, alors la majorité souhaite que le patient le plus à même de profiter des soins bénéficie d'un respirateur.
Le fait d'avoir des enfants est également un point qui compte pour les sondés. Dès lors, plus de 550 contre moins d'une vingtaine estiment qu'il faut attribuer un respirateur au parent au détriment de l'autre malade, parce qu'il a la responsabilité de mineurs. A contrario, les capacités financières ne sont pas jugées comme pertinentes éthiquement parlant. Les sondés ont jugé qu'un don à un établissement de santé contre un accès à un respirateur n'était pas acceptable. Il en a été de même concernant une mise aux enchères par une clinique privée d'un lit doté d'un respirateur.
Pour Johan Rochel, il est également important de s'interroger sur l'élaboration des directives. Une écrasante majorité des personnes interrogées plébiscite les médecins, les scientifiques et les experts plutôt que les politiques. Mais on peut se poser la question de l'élargissement de ce cercle, aux associations de patients par exemple, conclut l'éthicien.
Directives actualisées
Sur le front du covid-19, le scénario du pire semble timidement s'éloigner de la Suisse. Le pays pourrait ne pas connaître la saturation totale de son système de santé, obligeant les soignants à choisir qui prendre en charge et qui laisser sur le bas côté de la route. Dit crûment, qui soigner et qui laisser mourir. Des situations rapportées par les professionnels de santé, notamment en Italie. Mais cette éventualité n'a pas été pour autant négligée. L'Académie suisse des sciences médicales (Assm) a mis à jour ses directives de triage le 20 mars dernier. Le document postule deux critères essentiels. Le premier est l'équité. A savoir que les ressources à disposition doivent être mises à disposition sans discrimination d'aucune sorte. Il s'agit d'éviter toute décision arbitraire. L'objectif qui doit être visé est celui de sauver un maximum de vies. Le pronostic à court terme est le facteur décisif pour le triage, est-il précisé.