La Suisse condamnée pour profilage racial

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Cour européenneLa Suisse condamnée pour profilage racial

Un Suisse a réussi à faire reconnaître par la Cour européenne des droits de l'homme que le contrôle de police qu'il a subi à Zurich était discriminatoire.


C'est à la gare de Zurich qu'avait eu lieu le contrôle d'identité controversé.

C'est à la gare de Zurich qu'avait eu lieu le contrôle d'identité controversé.

20min/Michael Scherrer

Ce jour de février 2015, à la gare de Zurich, Mohamed Wa Baile, de nationalité suisse, a décidé de refuser son contrôle de police, qu'il estimait être dû au seul fait qu'il était noir. La police l'a emmené à l'écart, l'a fouillé, bras en l'air et jambes écartées. Les agents n'ont rien trouvé et, après avoir pu vérifier l'identité de l'homme, l'ont laissé partir. Et ce alors que, «le jour du contrôle, aucun autre individu, parmi la foule des personnes – presque toutes blanches de peau selon lui – qui se rendaient au travail, n’a été soumis à un contrôle d’identité». Neuf ans plus tard, ce mardi, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a reconnu la Suisse coupable de profilage racial et lui demande de verser près de 24'000 euros de frais à la victime.

C'est l'issue d'un long parcours. D'abord, l'homme avait été condamné lui-même à une amende de 100 francs pour avoir refusé les injonctions de la police. À l'échelon supérieur, il a réussi à faire sauter l'amende, le tribunal administratif de Zurich jugeant que le contrôle était illicite. Or, ni ce tribunal ni le Tribunal fédéral ensuite n'ont voulu se prononcer sur la question du profilage racial. 

La Suisse n'a pas fait son travail

C'est donc ce que vient de faire la CEDH. «La Cour estime que les autorités compétentes avaient l’obligation de rechercher si le contrôle d’identité et la fouille auxquels le requérant avait été soumis avaient ou non une motivation raciste», note-t-elle dans sa décision. Ce que les tribunaux suisses n'ont pas fait. Son analyse des faits lui fait conclure qu'il y a bel et bien eu «présomption» de profilage racial.

La Suisse, concrètement, est condamnée pour avoir violé deux articles de la Convention européenne des droits de l'homme: celui qui interdit la discrimination, celui qui donne droit au respect de la vie privée. «La Cour, bien consciente des difficultés qu’il y a pour les agents de police à décider, très rapidement et sans nécessairement disposer d’instructions internes claires, s’ils sont confrontés à une menace pour l’ordre ou la sécurité publics, conclut qu’il existe, dans le cas concret, une présomption de traitement discriminatoire et que le Gouvernement n’est pas parvenu à la réfuter», conclut-elle.

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