Séisme politique en France: À 2 ans de la présidentielle, le rêve de Marine Le Pen torpillé

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Séisme politique en FranceÀ 2 ans de la présidentielle, le rêve de Marine Le Pen torpillé

L'ex-présidente du RN était la favorite du premier tour de l'élection de 2027. Sa condamnation porte un coup de massue à ses ambitions.

La cheffe de l'extrême droite française a quitté, lundi, le tribunal avant la lecture de sa peine.

La cheffe de l'extrême droite française a quitté, lundi, le tribunal avant la lecture de sa peine.

IMAGO/ABACAPRESS

Le rêve de conquête de la présidence française par Marine Le Pen, objectif poursuivi depuis plus de dix ans, apparaît aujourd’hui fortement compromis après la décision de justice qui condamne lundi la cheffe de file de l’extrême droite à une inéligibilité immédiate.

Un tribunal de Paris a reconnu Le Pen coupable de détournement de fonds publics, l’a condamnée à quatre ans de prison dont deux ferme, sous bracelet, et l’a déclarée inéligible cinq ans, à deux ans de la présidentielle de 2027 pour laquelle elle apparaissait favorite après trois tentatives infructueuses.

Un coup dur

Marine Le Pen était donnée largement en tête du premier tour d’un prochain scrutin présidentiel, avec 34% à 37% des intentions de vote, selon un sondage publié dimanche.

Cette décision de justice est un coup dur pour celle qui incarne depuis plus d’une décennie le visage d’une extrême droite dédiabolisée et banalisée, bien que toujours aussi radicale, et qui a mené sa famille politique à des niveaux historiques, avec un nombre record de 89 députés après les législatives anticipées de 2024.

Sa chevelure blonde et sa voix rauque sont familières des Français depuis près de quinze ans, lorsqu’elle a repris le flambeau du Front national, le sulfureux parti fondé par son père Jean-Marie Le Pen dans les années 70. Elle a déjà été trois fois candidate à la présidentielle, deux fois finaliste face à Emmanuel Macron.

Patiemment, méthodiquement, la benjamine de la famille Le Pen, aujourd’hui âgée de 56 ans, a progressivement lissé et adouci l’image et le discours du parti, rebaptisé Rassemblement national (RN) en 2018.

Faire oublier les saillies racistes

Le Pen s’est employée à faire oublier les saillies racistes et antisémites du patriarche (pour lesquelles il a été condamné en justice), et les racines du parti, qui comptait dans ses rangs à sa création des anciens de la collaboration pétainiste, ou de l’organisation clandestine OAS (Organisation de l’Armée secrète) défendant l’Algérie française.

La «dédiabolisation» du FN est allée jusqu’à l’exclusion en 2015 de Jean-Marie Le Pen, une décision qu’elle ne se «pardonnera jamais», a-t-elle cependant affirmé après le décès de son père en janvier dernier.

Affichant le visage rassurant d’une «mère de famille» préoccupée par la défense des «plus vulnérables» et du pouvoir d’achat des Français, s’exposant sur les réseaux avec ses chats, Marine Le Pen a gommé ou abandonné au fil du temps les aspects les plus rugueux du programme de son parti, comme la sortie de l’euro, longtemps réclamée.

Un projet toujours aussi radical

Elle a brouillé les lignes, se proclamant «meilleur bouclier» des Français juifs, arborant République et laïcité en étendard contre «le fondamentalisme islamiste», tout en jugeant l’islam «compatible avec la République». Mais, sur le fond, le projet est resté toujours aussi radical, mettant au cœur la «priorité nationale» face aux immigrés, principale antienne de son parti.

Longtemps accusée de complaisance avec la Russie de Vladimir Poutine, la cheffe de file de l’extrême droite a semblé prendre ses distances après l’invasion à grande échelle de l’Ukraine en 2022.

Lors du procès dans le dossier des «assistants fictifs» au Parlement européen ouvert en septembre et qui lui vaut sa condamnation, la cheffe de file de l’extrême droite s’est posée en victime et a crié au scandale, estimant que la justice voulait la condamner à une «mort politique». Son inéligibilité propulse le populaire Jordan Bardella, président du parti depuis 2021, comme potentiel candidat au scrutin présidentiel français.

(afp)

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