Mondiaux de freestyleMathilde Gremaud: «Un feeling que je vais garder»
La Fribourgeoise est revenue de loin pour fêter un nouveau titre planétaire, en Engadine. Encore une fois, il a été question de «tête».

Le sourire soulagé de la skieuse de la Berra.
Getty ImagesCe qui est bien avec le calendrier chamboulé par les organisateurs à cause des prévisions météo, c'est que la Suisse a vécu de grands moments en peu de temps, ce vendredi dans les Grisons. Ce qui n'est pas bien en revanche, c'est que les journalistes ne peuvent pas être simultanément à Corviglia pour voir Fanny Smith gagner et à Corvatsch pour voir Mathilde Gremaud l'emporter. Alors grâce au concours de l'excellent Laurent Morel de SkiActu.ch, on a quand même pu recueillir de loin les impressions de la championne du monde de slopesyte et merci à lui. Morceaux choisis.
Encore une fois, vous avez répondu présent le jour J.
Je ne sais pas si c'est fort, mais c'est toujours le but… Et il est atteint, c'est ça qui compte. Mais ça ne se prépare pas en un jour. C'est quelque chose que j'ai dans la tête depuis la saison passée. C'était quasiment mon seul objectif pour cette année. En effet, vu de l'extérieur, mon exercice 2024/2025 n'est pas hyper… vivante, je dirais. Mais pour moi, beaucoup de choses se sont passées et c'était hyper intense et super intéressant. Après, il y a eu la blessure et cinq semaines de gros doutes. Mais finalement, ça m'a laissé pas mal de place pour la préparation mentale. J'ai eu énormément de soutien de la part de ma famille et de mes proches. Ça a finalement été un peu une chance d'avoir ce temps où je n'ai intéressé personne pour être seule avec moi-même et travailler sur les choses qui étaient importantes. Celles dont j'avais besoin pour aujourd'hui.
Ça vous a enlevé de la pression?
Je crois qu'au contraire ça m'en a mis un peu. Au début, je me suis dit que c'était mort, quoi… Après, je me suis dit que non, que c'était un nouveau challenge. Je me suis dit aussi que pour ma santé, il fallait que je fasse attention. Ensuite, ça ne s'est pas amélioré pendant un bon moment et puis la semaine passée... C'est un peu «sketchy» (ndlr, vague) comme on dit. Et là, j'avais toujours de la pression et après ça repartait. C'est un type de pression que je ne connaissais pas. Je crois que ça m'a quand même aidée à me concentrer sur l'essentiel, en fait. Ça m'a permis d'oublier de me dire qu'il fallait apprendre ces tricks, qu’il fallait que je fasse ça, que ça et ça soient prêts… Là, il fallait que la tête soit solide et c'était le plus important.

Sur le podium avec Lara Wolf et Megan Oldham.
Getty ImagesVous avez plaqué le run qu'il fallait, en ne prenant pas tous les risques, aujourd'hui?
Ouais, je pense qu'on a eu une super bonne approche, avec mon équipe. Encore une fois, avec Greg (ndlr, Tuscher), on a eu un super feeling. On s'est toujours calés sur la même chose. Là, j'ai fait une petite erreur au premier run de qualification, où on s'est dit: «On ne fait pas la même en finale.» Donc c'est pour ça que j'ai fait un cinq et non un neuf, sur le dernier saut. Sinon le reste du run, j'étais prête, j'avais tout fait et je me sentais bien. Mais j'étais quand même nerveuse. Et puis voilà, au départ, on a rigolé un peu et on se disait que c'était horrible. On se demandait ce qu'on faisait là et ça tapait un peu sur les nerfs. Et puis après, on a rigolé un bon coup et la pression est partie.
J'ai pu vraiment faire le run que je voulais, sans pression, avec une légèreté que j'ai pu apprécier de haut et en bas. Je pense que c'est ce qui a été ressenti et pas que chez moi. C'est un super feeling que je vais garder. Je me souviens de tous les détails du run et c'est encore plus beau de pouvoir avoir la médaille d'or. Le mieux, c'est de se rendre compte de la performance. Pas la performance, genre «ouais, j'ai gagné», mais juste ma performance à moi, comment j'ai réussi à skier et comment je me suis senti. C'est hyper agréable et c'est trop bien.
Où placez-vous cette médaille au milieu de vos titres olympiques et de vos nombreux globes?
Ouais, celle-là, elle est pas mal... Elles sont toutes pas mal, elles ont toutes une belle histoire. Je suis hyper contente. Mais je ne sais pas où la placer. Sur la même ligne, en haut, avec les autres. Comme s'il y avait des guirlandes et qu'elles étaient toutes à la même hauteur.

Celle-ci, vous l'avez gagnée dans la tête, non?
Ouais, je l'ai gagnée dans la tête, c'est clair. J'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir. J'ai essayé d'optimiser toute la préparation physique et de bien gérer la blessure. J'ai pris langue avec des personnes avec qui je n'avais pas forcément eu contact ces derniers temps. J'ai aussi été chercher les personnes qui, je le sais, me font du bien, m'amènent des choses. Je me suis construite cette petite équipe avec des personnes qui forment un «safe space», une bulle autour de moi, vers qui je sais que je peux me tourner. Vers Greg, vers mes parents, je peux me tourner vers eux et j'ai vraiment essayé d'avoir ces points de soutien.
Et puis c'est hyper cool parce que tout le monde a répondu présent pour me soutenir. Ça, c'est aussi une chance. Je ne pense pas que tout le monde l'a, mais moi, j'ai été chercher les personnes qui me veulent du bien, autant que moi. Je me veux que du bien, donc. On a beaucoup parlé des points qui avaient besoin de communication.
C'était quoi les aspects à réparer?
Il y a un gros truc qui m'a freinée: des problèmes à la nuque. Les premiers jours où j'ai skié, j'avais l'impression que ma tête était complètement séparée de mon corps. Ce n'était pas du tout stable. C'était pas cool. Je me suis dit que si je ne me sentais pas stable, ça affectait tout mon ski et ça me donnait des grosses tensions. Je n'avais rien de cassé, mais il y avait clairement eu la nuque et la tête qui avaient pris un coup. Pendant longtemps, ça n'allait pas du tout.