Suisse: Mastectomie chez les ados: critiques de médecins peu écoutées

Deux articles parus dans le «Swiss Medical Forum», l’une des principales revues médicales de Suisse, ont fait réagir trois médecins. Le pédiatre genevois Daniel Halperin, Jacques de Haller, ancien président de la FMH, et Urs Eiholzer, directeur du centre d’endocrinologie pédiatrique de Zurich, ont écrit une lettre de lecteur à la publication. Les articles controversés portaient sur les opérations visant un changement de sexe chez les mineurs.

Urs Eiholzer les considère comme des prises de position et non des articles scientifiques. Il leur reproche de mettre sur le même plan des adolescents et les adultes. «Je ne suis pas d’avis, par exemple, que l’on puisse accepter sans contestation le souhait d’une jeune fille de 12 ans de changer de sexe», affirme-t-il dans la «SonntagsZeitung».

L’inquiétude vient des chiffres de l’Office fédéral de la statistique. Ils montrent que les interventions visant un changement de sexe chez les 15-19 ans sont en forte augmentation. Une dizaine d’ablations de la poitrine ont été réalisées chez des jeunes filles de 10 à 14 ans entre 2018 et 2021. Urs Eiholzer rappelle qu’il n’est pas du tout opposé à de telles opérations en général mais souhaite l’ouverture d’un large débat pour que des avis plus critiques puissent s’exprimer et que certaines prises en charge soient mieux encadrées.

Le commentaire de trois pages envoyé à la revue n’a pas été publié, car la rédaction l’a jugé trop long. Une version plus courte a été proposée mais a aussi été refusée, car jugée pas suffisamment scientifique. Jacques de Haller considère dans le journal alémanique «inacceptable que la science ne puisse pas être discutée». La revue assure que les articles incriminés ont été soumis à un processus de vérification par des pairs, mais n’en apporte pas la preuve. La rédaction a promis de donner un espace aux remarques des médecins mais ne s’est pour l’instant pas encore exécutée.

Le sujet des interventions pour changer de sexe chez les mineurs est toujours plus au centre de l’attention politique en Suisse. Le Grand Conseil bernois a accepté jeudi un texte visant à interdire ces opérations, même si son application risque d’être difficile.