Genève: Une manifestation a exigé la libération de Jérémy, militant du climat incarcéré à Champ-Dollon

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GenèveUne rage solidaire a exigé la libération de Jérémy, militant du climat

Près de 300 personnes ont défilé dans le calme en soutien au jeune activiste, en détention provisoire depuis mars dernier. Une mesure qui suscite de nombreuses critiques.

Le défilé pour exiger la libération de Jérémy a réuni près de 300 personnes, vendredi 2 juin 2023.
La mère du militant pour l’environnement ne comprend pas «l’acharnement» de la justice contre son fils.
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Le défilé pour exiger la libération de Jérémy a réuni près de 300 personnes, vendredi 2 juin 2023.

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«La seule chose que l’on peut faire, c’est montrer notre solidarité et notre soutien à Jérémy*», soupire le père du jeune militant détenu préventivement à la prison de Champ-Dollon depuis maintenant 76 jours. Vendredi soir, près de 300 personnes ont défilé pour exiger la libération de cet activiste du climat, accusé d’avoir notamment saboté des engins du cimentier Holcim (cf. encadré ci-dessous), il y a un an et demi. 76 jours: une éternité pour le cousin de Jérémy. «J’essaie de rester impartial, je ne veux pas me prononcer sur sa culpabilité supposée. Mais il y a un présumé innocent en prison et des entreprises coupables de polluer en liberté. C’est injuste…»

Le timing judicaire et la décision d’une incarcération préventive en raison d’un «risque de collusion» suscitent colère et incompréhension parmi les manifestants. Si un tel risque existait, pourquoi alors avoir laissé libre l’activiste durant des mois, avant de soudainement l’emprisonner en mars dernier? C’est un non-sens, martèlent les participants au cortège. Membre du comité de soutien à Jérémy, Camille assure que les droits de ce dernier «ont été continuellement bafoués depuis le début de l’affaire»; sa détention serait «politique». Un avis largement partagé au cœur du défilé: «On veut faire pression sur les militants pour le climat, on veut leur faire peur.»

Décision imminente

Digne, la maman du militant apparait également solide face aux événements. Et pourtant: «Je ressens une rage folle qui me glace le sang. J’essaie de comprendre cet acharnement de la justice, mais je ne saisis pas le sens de cette détention qui dure depuis trois mois.» 

Aujourd’hui, Jérémy et ses proches sont suspendus à la décision du Parquet d’interrompre – ou de prolonger  – sa détention préventive, prévue jusqu’au 15 juin. «Il n’y a rien d’autre à faire qu’attendre, souffle la mère du jeune homme. J’ai vu mon fils hier (ndlr: jeudi), à la prison. Il est très courageux.»

Des saisies qui interrogent

Un récent événement a par ailleurs envenimé la situation. Le 18 mai, des gardiens de Champ-Dollon auraient saisi des cahiers de notes du jeune homme, dans sa cellule, en son absence, sans mandat et sans l’en avoir informé. Ces écrits, transmis à la procureure en charge de l’instruction, contiendraient entre autres des retranscriptions de conversations entre Jérémy et son avocat, censées rester privées et confidentielles, en vertu du secret garanti à la défense d’un prévenu. Ces saisies sont illégales, selon l’avocat du militant, cité par la «Tribune de Genève».

Ces accusations ont aussi été portées par la mère de Jérémy sur le plateau de Léman Bleu, mercredi passé, et relayées le lendemain dans un communiqué du comité de soutien au militant. Contacté, l’Office cantonal de la détention a renvoyé au Ministère public. Ce dernier a répondu qu’il «n’instruisait pas dans les médias» et «n’entendait pas se déterminer sur le contenu du communiqué de presse».

*Prénom d’emprunt

La saga dure depuis un an et demi

Jérémy est accusé de violation de domicile, d’incendie intentionnel et de dommages à la propriété. Avec des tiers non identifiés, il aurait mis le feu à des engins de chantier du cimentier Holcim, dans une gravière à Laconnex (GE), le 4 janvier 2022. Le Ministère public lui reproche aussi d’avoir «saboté» d’autres véhicules, et sprayé des menaces ainsi que des insultes sur des façades de bureau. Un mandat d’amener a été délivré le 15 juin 2022. Mais ce n’est que le 15 mars dernier – soit neuf mois plus tard – que le jeune homme a été appréhendé et placé en détention préventive pour «risque de collusion». L’activiste a fait recours contre cette mesure, que le Tribunal fédéral a rejeté le 12 mai. Au cours des procédures entamées l’an passé, la justice a relevé le manque de collaboration de Jérémy, qui a notamment refusé de s’exprimer et de donner les codes d’accès de plusieurs de ses appareils électroniques. Le prévenu conteste les faits qui lui sont reprochés et reste présumé innocent.

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