TravailLes PME, moins durables que les grandes entreprises
Les PME sont à la traîne en matière de durabilité. L’Institut suisse pour les PME et l’entrepreneuriat de l’Université de Saint-Gall en explique les raisons.
«En matière de durabilité, les PME ont besoin d’une remise à niveau.» Telle est la conclusion de l’étude sur la durabilité dans les entreprises suisses réalisée par l’Institut de recherche économique bâlois BAK Economics. Pour Louise Hugenschmidt, responsable de cette recherche, «les PME jouent un rôle central dans la réalisation de l’objectif zéro net, car l’économie suisse est composée à 99% de PME».
Pourquoi les PME sont-elles moins durables?
«Une PME est souvent une entreprise familiale, dont la dimension intergénérationnelle est fondamentalement ancrée dans son ADN», explique Thibault Huber, collaborateur scientifique à l’Institut suisse pour les PME et l’entrepreneuriat de l’Université de Saint-Gall. Si l’incitation à une gestion durable est bien présente, les PME obtiennent pourtant de moins bons résultats que les grandes entreprises dans ce domaine. À quoi est-ce dû?
Un facteur semble pouvoir l’expliquer: les grandes entreprises de l’Union européenne (UE) doivent établir des rapports de durabilité. Si une PME livre plusieurs d’entre elles, elle devra aussi leur fournir de nombreuses données, et parfois différentes. «C’est souvent mal vu, car c’est une charge administrative non payée et qui, en plus, n’a pas de réelle influence sur la durabilité», explique Alexander Fust, responsable du transfert à l’Institut suisse pour les PME et l’entrepreneuriat de l’Université de Saint-Gall.
Comment les PME peuvent-elles devenir plus durables?
Une PME est une entreprise qui emploie moins de 250 personnes. Ce terme englobe donc aussi bien le salon de coiffure que l’entreprise familiale hautement industrialisée dans le domaine de la technique médicale. Il est donc difficile de donner des conseils généraux, mais toutefois pas impossible.
Alexander Fust et d’autres auteurs ont publié un guide de la durabilité pour les PME. Ils y distinguent l’approche pragmatique de l’approche systématique. «En principe, c’est toujours bien de faire quelque chose, mais une approche systématique est souvent meilleure, car elle permet de toucher plus rapidement au but.»
Il faut cependant plus de temps pour aborder la durabilité sous un angle systématique. Ce sont souvent de petites mesures qui permettent de lancer un processus qui conduira vers plus de durabilité dans la PME.
Quelles sont les mesures faciles à mettre en œuvre?
«Généralement, tout ce qui permet d’obtenir beaucoup d’effets avec peu d’efforts est intéressant, affirme Alexander Fust. Dans le secteur des services, le plus grand levier se situe souvent au niveau des pendulaires ou des déplacements professionnels.» S’agissant des autres secteurs entrepreneuriaux, il est souvent possible d’agir sur la consommation d’énergie des bâtiments. «Cela vaut la peine de faire le tour du magasin avec un expert en énergie et de voir où l’on peut par exemple réguler la consommation d’énergie avec des produits intelligents, poursuit-il. En plus, cela permet souvent même d’économiser de l’argent.»
Il en va de même pour l’installation de panneaux solaires ou le passage à la voiture électrique. On peut également s’interroger sur les articles que l’on produit: combien d’électricité consomment-ils? «Si la consommation auprès de la clientèle peut être réduite de 20%, cela peut avoir des effets d’échelle importants», explique Alexander Fust. Une production plus durable peut également devenir un avantage concurrentiel, notamment si les clients peuvent économiser sur les coûts.
Outre le guide de l’Institut suisse pour les PME et l’entrepreneuriat de l’Université de Saint-Gall, la Mobilière propose un calculateur de CO2, qui donne des informations sur la manière de réduire ces émissions-là. La Toolbox Agenda 2030 de la Confédération livre également des conseils aux PME sur la façon dont elles peuvent devenir plus durables. Des outils d’évaluation en ligne, comme esg2go, développé à Fribourg, peuvent constituer un soutien supplémentaire. Ce dernier permet aux PME de mesurer et de comparer leurs performances en matière de durabilité dans les domaines de l’environnement, du social et de la gestion d’entreprise.
Quelle que soit la mesure adoptée, «il est important qu’il ne s’agisse pas d’une action unique, mais d’un processus continu», insiste Alexander Fust.
Comment sensibiliser les patrons sceptiques à davantage de durabilité?
Il est important, au préalable, de clarifier une question: qu’est-ce qui doit être donné à son chef pour que la mesure soit mise en place? «Si une mesure permet de réduire les coûts, elle sera souvent appliquée», explique Alexander Fust. Il s’agit d’identifier et d’élaborer des mesures profitables à la PME.
«On voit souvent que plusieurs collaborateurs motivés s’attaquent ensemble à ce sujet», constate Thibault Huber. Cela permet de rester dans le coup et de se répartir les tâches. Il est en outre judicieux de procéder étape par étape et de ne pas s’attaquer à plusieurs mesures en même temps. «On se perd moins vite et, en cas d’échec, on court moins le risque de susciter un scepticisme généralisé à l’égard des initiatives de durabilité au sein de l’entreprise.»
Pour identifier les meilleures mesures, il existe donc les outils et le guide mentionnés ci-dessus, mais aussi les échanges au sein de la branche. «Notre institut participe, par exemple, aux Green Days de Saint-Gall, où l’on peut échanger des idées sur ces thématiques et s’inspirer mutuellement», conclut Thibault Huber.
La durabilité joue-t-elle un rôle dans votre travail?